From another point of view
Oui are Pain
Le projet de Nerea et Elena penche plutôt dans ce sens. Elles font passer cette pâte apparemment simple,
faite de farine et d'eau bouillie, à la dimension supérieure. Le résultat ? Un nouveau langage esthétique
où cet élément vivant est le maître du jeu.
Son histoire est intéressante et, comme beaucoup d'autres, la pandémie les a réunies (dans leur cas) grâce au pain.
Aucune d'entre elles n'avait un passé lié à la boulangerie ou à la pâtisserie, mais cette nouvelle approche du sujet, presque muséale,
les a réunies et nous espérons que cette entente va durer.
Nous discutons avec elles de leurs projets pour @ouiarepain. Elles expliquent qu'elles sont actuellement en train
de développer et de théoriser l'œuvre et son processus. Un travail éphémère, limité par la courte durée de vie du matériau avec
lequel elles travaillent, qui les surprend à chaque pièce, se transformant au cours de sa cuisson et avec sa propre détérioration organique.
Sur leur compte Instagram @ouiarepain, vous pouvez voir de quoi nous parlons.
Nous vous assurons que vous serez fascinées dès le premier instant, car c'est vraiment quelque chose d'unique.
NT — Quelles sont vos références ou quel caractère ou discipline vous inspire ou vous nourrit le plus ?
Elena — Pour ce projet, nous nous sommes inspirées d'images décontextualisées d'intérieurs, de meubles, de sculptures, d'artisanat, d'installations d'exposition et de textures ou de morceaux de pain artisanal pour aborder les pièces, mais de manière très organique. Dès le premier lot de pièces que nous avons cuisinées, je dirais que l'esthétique de PAIN a prévalu sur les objets eux-mêmes. Je dirais que l'image définit le projet car elle a également défini nos carrières professionnelles. Bien que nous ayons une esthétique très minimaliste, le soin apporté aux présentations, à la palette de couleurs et au traitement photographique des pièces rehausse notre travail et est aussi important, voire plus, que les pièces elles-mêmes.
NT —Comment combinez-vous vos projets professionnels respectifs avec PAIN ?
Nerea - VNous trouvons le temps de nous perfectionner petit à petit, car finalement le travail quotidien sur nos projets individuels nous absorbe beaucoup toutes les deux. Je pense que depuis le début, Pain a été un projet lent mais très satisfaisant. C’est surtout tous les retours que nous recevons qui nous motivent le plus à continuer à créer des pièces. Nous avons l'impression que Pain nous tire plus que nous ne tirons de Pain.
NT — Tout d'abord, comment est née PAIN (@ouiarepain) ?
Nerea — J'ai rencontré Elena peu avant la pandémie, par le biais d'amis communs, et le confinement est arrivé immédiatement et les discussions nous ont rapprochées. Pendant cette période d'enfermement, nous avons tous cherché des choses à créer et pour nous occuper, la fièvre de faire du pain à la maison s’est généralisée, et bien sûr, nous avons aussi craqué. Nous nous envoyions des photos de nos baguettes de pain faites maison, et des idées nous venaient immédiatement à l'esprit. Instagram est un outil extraordinaire pour se perfectionner et chercher des idées et nous avons commencé à mettre en commun des choses qui nous inspiraient. A la sortie du confinement, nous nous sommes donné rendez-vous pour commencer à créer des pièces avec du pain, pour voir si nous étions capables de faire ce que nous avions pensé et partagé. Cela a également servi à mieux nous connaître. Nous avons commencé à étudier comment travailler avec du pain et comment créer et reproduire des modèles. Je me souviens des premiers morceaux comme de quelque chose d'excitant, et il est vrai que le pain est quelque chose de vraiment incroyable. Chaque petit élément est spécial.
NT — Nous adorons la réplique de la table Noguchi. Avez-vous l'intention de réaliser d'autres répliques de pièces emblématiques ?
Elena — En fait, l'une des pièces que nous avons préparées dans la première fournée était une chaise inspirée de la Thonet nº 18 de Michael Thonet, un modèle du XIXe siècle qui semble très familier et reconnaissable pour tout le monde. Peu de temps après, nous avons décidé de faire une réplique du Noguchi parce que pour moi, il est fondamental de souligner l'idée que le projet a plus à voir avec les disciplines de l'art et du design qu'avec la cuisine ou l'artisanat. Vous allez donc certainement en voir plus.
NT — Le pain est une matière apparemment très facile et quotidienne, mais en même temps extrêmement complexe à travailler, car il y a une partie technique essentielle dans le processus. Comment se passe ce travail de recherche sur le sujet ?
Nerea — Jusqu'à présent, cela a été un processus d'apprentissage, aucune de nous ne se consacre au pain et ne sait comment il marche à 100 %. Nous prenons des notes de ce que nous faisons habituellement dans chaque pièce et nous voyons ce qui fonctionne le mieux et ce qui ne fonctionne pas. Nous comparons les types de farine, les mélanges, même les colorants comestibles, les temps de cuisson, etc. De nombreux facteurs jouent sur la masse et je pense que c'est pourquoi l'une des choses les plus intéressantes de ce projet est qu'il y a tant de choses à explorer et à créer.
NT — Quel rayonnement souhaitez-vous donner au projet ?
Nerea — J'aimerais trouver l'espace et le temps nécessaires pour approfondir la question du pain, car jusqu'à présent, nous sommes dans une phase d’essais et d’erreurs. Une résidence serait idéale pour améliorer la technique, je pense que ce serait génial pour faire avancer les processus.
Elena - Je vois dans une résidence d'artiste le contexte idéal non seulement pour continuer à expérimenter la masse et à tester les limites et les caractéristiques de la matière, mais aussi pour pouvoir concevoir et monter une installation plus complexe. L'univers de Pain est défini mais la prochaine étape serait de développer un projet qui pourrait être placé dans un contexte muséal et avoir une narration plus spécifique.
NT — Et enfin, les incontournables :
• Un livre:
Nerea - Je ne suis pas une grande lectrice mais j'ai vraiment aimé Tokio Blues de Murakami.
Elena - J’ai actuellement sur ma table de chevet une anthologie de poésie féministe de 1969 à 1979 intitulée
« One foot on the Mountain ». Comme celui-ci n’est plus dans les rayons, je vais faire un peu de promotion
et vous recommander mon premier livre, « El Diablo es una mujer », que j'ai publié en novembre de l'année dernière, hahaha !
• Un film:
Nerea - J'ai récemment vu « Fire Of Love », un documentaire sur un couple de volcanologues. Ce n'est pas mon film préféré,
mais j'ai trouvé que c'était l'un des films les plus beaux visuellement que j'aie vus depuis longtemps. Les images analogiques enregistrées par elles-mêmes
sont magnifiques. Une histoire très spéciale et vraiment tendre.
Elena - Barbicania. Un documentaire architectural qui m'a été récemment recommandé, réalisé par Ila Bêka et Louise Lemoine. Il fait le tour de
l'un des exemples les plus uniques d'architecture brutaliste, et montre comment des espaces uniques sont définis par les histoires et les personnes qui les habitent.
• Un lieu.
Nerea - L’Islande
Elena - La Colombie-Britannique